Thursday 4 January 2018

Semaine 9. Les invertébrés marins :  Les poulpes


Ni dans les océans…
  • Godfrey-Smith, P. (2016). Other minds: The Octopus, the sea, and the deep origins of consciousness. Farrar, Straus and Giroux.

10 comments:

  1. Selon les études génétique mentionnées dans l'ouvrage, le dernier ancêtre commun des céphalopodes et des chordés (toute lignée avec une colonne vertébrale) vivait il y a 600 millions d'années (Ma), soit à peu près l'age des plus anciens fossiles d'animaux dont nous disposons aujourd'hui. Pourtant, les études génétiques suggèrent fortement qu'un système nerveux rudimentaire existait déjà chez certains animaux de cette époque. Le système nerveux serait apparu il y a 700 Ma, donc environ 100 Ma avant la divergence entre les céphalopodes et les chordés, à une époque dont nous n'avons aucun fossile clair.

    Ces informations suggèrent que nos systèmes nerveux différents se sont probablement développés à partir d'un système plus ancien présent chez un ancêtre commun et que leur construction différente s'est élaborée à partir des mêmes éléments de base. Considérant les dates, il se peut que les bases du système nerveux de tous les animaux proviennent du même ancêtre commun: le dernier ancêtre commun à tous les animaux est un organisme ressemblant une méduse (il remonterait entre 610 Ma pour le plus vieux fossile connu, et 1 Ga pour les hypothèses les plus reculées), et le premier animal doté d'un système nerveux serait, selon les études génétiques, aussi un organisme ressemblant à une méduse et aurait vécu il y a 700 Ma.

    Bref, il se pourrait le premier système nerveux soit celui du dernier ancêtre commun à tous les animaux (une sorte de cténophore).

    https://blog.geolsoc.org.uk/2017/05/04/the-search-for-the-worlds-oldest-animal-fossils/

    http://www.nature.com.proxy.bibliotheques.uqam.ca:2048/articles/nature13400?foxtrotcallback=true

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  2. Je trouve ça intéressant de considérer qu'il y ait un point commun entre les êtres dotés de ressenti: le système nerveux. Cependant, comme on l'a vu dans d'autres textes il n'est pas évident qu'un organe soit à la base du ressenti (Woodruff). Bien que les auteurs aient tendance à faire des parallèles entre différents organes, j'aurais tendance à amener cette critique pour tous les organes quels qu'ils soient, système nerveux compris.

    Une des raisons pour laquelle je pense que le ressenti devrait être accordé à beaucoup plus d’êtres vivants que simplement les mammifères ou les animaux possédant un système nerveux est que je ne crois pas qu’il soit possible qu’un être vivant n’ait pas de perception (d’expérience de son environnement). Y a-t-il quelque chose de vivant qui puisse ne pas avoir de perceptions ou sensations? Qu’est-ce que serait une expérience sans rien pour le ressentir? Il me semble que le fait d’être en vie fait en sorte qu’il se passe toujours quelque chose : sensations, perceptions extérieurs ou intérieurs etc.

    Cela me rappelle quand j’étais petite pour m’endormir j’essayer d’arrêter de penser, bien sûr ça n’a jamais fonctionné. Je me demandais ce que c’était que de ne pas penser, de ne rien ressentir et de ne rien avoir dans la tête et je voulais l’expérimenter. Aujourd’hui je crois que cet état n’est pas possible pour un être vivant à moins qu’il ne soit mort. Pour un humain dans le coma, il se passe bien quelque chose puisqu’il est vivant. Peut-être que ce qu’il faut remettre en question n’est pas le fait qu’il soit vivant malgré qu’il ne soit pas conscient, mais plutôt qu’il soit inconscient. Qu’est-ce que c’est que d’être inconscient? Est-ce qu’on ne juge pas trop vite qu’il est inconscient juste parce que nous ne sommes plus capables d’entrer en interaction avec la personne?

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    1. Je n'ai pas autant de difficulté à imaginer que parfois, quand je dors profondément sans rêver, je ne ressent rien pour un bout de temps même si je suis certainement encore en vie. Cet exemple est toutefois banal, alors j'en mentionne quelques autres pour pousser un peu la réflexion.

      A) Est-ce qu'absolument tous les patients dans le coma (certainement vivants) ressentent quelque chose en tout temps ?

      B) Certaines grenouilles peuvent hiberner pendant que leur corps est complètement congelé (mort suspendue), doit-on nécessairement admettre que soit 1) elles ressentent sans même que leur sang circule, ou 2) qu'elles ressuscitent à chaque année ?

      C) Les graines de nombreuses plantes peuvent rester dans un état de vie latente (aucune activité métabolique) parfois très long (plusieurs années sans eau/oxygène/etc), est-ce qu'elles ressentent pendant cette période ou bien si elles passent d'un état 'mort' à un état 'vivant' du jour au lendemain ?

      D) Ensuite, l'exemple mentionné par Étienne, une personne atteinte de mort cérébrale ne ressent rien, mais doit-on la considérer morte (ses cellules sont certainement en vie, mais il est moins évident que ce soit le cas pour la personne en tant qu'humain)?

      E) Finalement, certains croient qu'il n'est pas impossible qu'on arrive à créer un robot qui puisse être considéré vivant (une définition courante, mais problématique, de la vie est quelque chose comme: activité métabolique + reproduction + descendance avec modification), est-ce qu'il faudrait automatiquement accorder le ressenti à une telle entité qui se qualifierait comme en vie ?

      L'idée d'associer le ressenti à la vie est attrayante, mais rencontre plusieurs problèmes assez sérieux. Celui de l'exemple E est assez profond : il n'y a pas de définition consensuelle de ce qu'est la 'vie'. Si on inverse le problème et on tente de définir la vie par la présence du ressenti, peut-être serait-on forcé d'exclure les plantes et les bactéries (au moins 99,99% des organismes considérés vivants) ou bien d'inclure de nombreux ordinateurs/robots/programmes informatiques...

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    2. Un exemple encore plus extrême du cas C :
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Cryptobiose

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    3. Clélia, Woodruff n'a pas remis en question que c'est le système nerveux qui génère le ressenti. Ce qui était débatu c'était les parties particulières du cerveau qui sont impliquées.

      La « perception » est déjà un terme équivoque: perception ressentie ou pas ressentie? (Je dirais que, pour la clarté, ça serait mieux d'envoyer l'idée d'une « perception non ressentie » à la retraite, car ça équivaut à un ressenti non ressenit! Il s'agit juste de la réception des entrées, leur traitement, et la réaction en sortie, comme dans un robot. On veut distinguer les espèces biologiques qui n'ont que des fonctions robotiques de celles qui ont des fonctions ressenties.)

      « Qu’est-ce que serait une expérience sans rien pour le ressentir? » Un événement, pas une expérience. « Expérience » est tout aussi équivoque que « perception »: du ressenti non ressenti. Si ce n'est pas ressenti, ce n'est pas une expérience.

      Je crois que j'ai donné l'exemple de la catégorie « Lélek »: Cette catégorie n'a que des membres. Tout ce qu'on mentionne est membre: les chaises, les tables, les pommes, toi, moi, les couleurs, la taille, la justice, la vérité, les chiffres, les atomes... et le contraire de tout, tout ce qui n'est pas chaise, table, etc. C'est une catégorie indéfinie, puisqu'il n'y a pas de non membres, pour pouvoir distinguer les membres des non membres. Et bien, telle est la catégorie « ça à quoi ça ressemble de ressentir », car la catégorie « ça à quoi ça ressemble ne pas ressentir » est vide, car elle est auto-contradictoire...

      Va googler « Lélek » en hongrois pour voir sa traduction française.

      Ces perplexités et ambiguités de la philosophie de l'esprit touchent aux questions traitées dans ce cours sur la biologie et la bioéthique du ressenti, donc la biologie de l'esprit, mais il ne faut pas se laisser fondre dans les équivoques des philosophes. Avec le ressenti il y la souffrance qui est en jeu; ce n'est plus juste une un exercise linguistique et spéculative...

      Comme l'indique Thomas, il faut toujours garder à l'esprit tout ce que peuvent faire les robots, pour contraîndre nos intuitions et nos spéculations concernant ce qui nécessite le ressenti. Et il faut se rappeler aussi que les êtres vivants ne sont que des ensembles de propriétés physiques. Le vitalisme c'est avéré faux. Il n'y a pas d'élan vital. Se peut-il que l'idée d'un élan vital avait toujours juste été un effet secondaire d'un animisme implicite, selon lequel les êtres vivants doivent être des êtres sensibles (« sensible » = « avoir le ressenti »)?

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  3. Merci pour vos réponses, c'est bien intéressant.

    Merci Thomas pour ton argumentation, c'est très clair. L'exemple des robots est le plus difficile à rétorquer...

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  4. Je me souviens qu'il avait été dit dans ce cours que le plus petit dénominateur du ressenti serait le système nerveux.
    Mais jusqu'à quel point l'on fait de l'anthropomorphisme en ayant comme prémise à nos théories que le système nerveux est la plus petite ''entité'' capable d'expliquer la possibilité d'un ressenti?

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  5. Dans le texte, Godfrey-Smith parle des humains qui ont eu des lésions à la voie Ventrale du traitement visuel (la voie qui s’occupe de détecter ce que sont les objets, la voie « what » qui est plus lente que la voie dorsale qui permet de rapidement détecter « where » où sont les objets). L’aspect d’inconscience plutôt que de conscience me surprend, particulièrement l’idée qu’on peut agir dans l’environnement, se mouvoir, sans être conscient des objets qu’on évite. J’avais tendance à justement accorder trop facilement le ressenti à tout ce qui est vivant et qui est capable de s’adapter à l’environnement. Mais je vois mieux comment un être vivant pourrait réussir à évoluer sans avoir de ressenti. L’idée que les bras des pieuvres sont en grandes parties inconscients est justement un bon exemple, la pieuvre arrive à exercer un certain contrôle, mais les bras sont relativement autonomes et réagissent individuellement à l’environnement. Ce drôle d’ensemble est en soi un mélange naturel qui a réussi à évoluer. Cela dit, ça ne facilite à répondre à la question du ressenti, car même si on a des parties qui agissent de façon autonome, on peut avoir un ressenti d’être en mesure de se déplacer dans une pièce, sans avoir la voie Ventrale, donc de ne pas reconnaître les objets mais d’être capable de les éviter. Ça doit ressembler à quelque chose de différent que d’être complètement aveugle et de ne pas savoir ce que sont les objets te où ils sont.

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  7. Sans être complètement aveugle, il y a le cas des chauves-souris. Le serais curieux de lire un article traitant de ce sujet. Sinon je chercherai.

    Une question que je me pose: à quoi ressemblait la voie du ''where'' et du ''what'' anatomiquement pour une chauve-souris?
    Si elle a de telles fonctions, et que l'on pense à un procéder du type ''bottom-up'', ça doit être assez intéressant de voir par où débutent ces voies.

    Ex: Chez l'homme: rétine vers le corps genouillé latéral vers le cortex visuel ... Ensuite division vers le cortex inféro-temporal pour la voie du ''what'' et vers le lobe pariétal pour la voie du ''where''.
    ( Il se peut que je me trompe c'est loin dans ma mémoire).

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