Thursday 4 January 2018

Semaine 12. Les êtres sensibles, les individus, les personnes?

Que faire pour protéger les esprits des autres espèces?

9 comments:

  1. À la lecture du texte de Rowlands, j'ai été déçue de voir que sa démonstration ne mène pas à quelque chose de concret, comme par exemple des implications juridiques ou morales au sujet du statut des animaux. Il me semble qu’il faudrait aller plus loin avec cette démonstration, puisqu’elle pourrait servir à défendre le droit des animaux et changer leur statut juridique. Rowlands ne dit pas ce qui est en jeu et pourquoi répondre à la question de savoir si les animaux sont des personnes est important. Qu’est-ce que cela fait que les animaux soient des personnes ou pas ? Il me semble que ce n’est pas le fait qu’on leur attribut le nom A ou B qui est important, mais plutôt ce que cela implique.

    J'ai trouvé ce texte intéressant parce que Rowlands amène une (fausse ?) nouvelle stratégie que nous n’avons pas encore rencontré dans le cours : plutôt que de montrer que les animaux possèdent le ressenti Rowlands prouve qu’ils sont des personnes. Cependant il montre que ce sont des personnes à partir de la notion de conscience (de soi et l’unité de la conscience). Ainsi Rowlands évite la question de savoir si les animaux possèdent une conscience ou non, il prend cela pour acquis. C’est tout à fait correct, on ne peut pas rester sur les mêmes questions ad vitam aeternam, mais je crois que Rowlands présente une explication basée sur plusieurs thèmes très controversés : la conscience, le statut intentionnel de la douleur, le schéma de l’intentionnalité, le test du miroir et probablement bien plus que je ne connais pas. En résumé, je trouve ce texte assez compliqué pour peu ou pas de conséquence, je trouve cela dommage.

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    1. Bien d'accord avec toi. Pour Rowlands, 'être une personne' revient à avoir la capacité de 'conscience pré-réflexive', mais je vois mal en quoi cela a des implications morales (contrairement à la capacité de ressentir la douleur par exemple). S'il n'y a aucune conséquence morale, je ne vois pas pourquoi on insiste sur le fait qu'on délimite une catégorie spéciale qui semble avoir une implication morale.

      Aussi, j'ai beaucoup de difficulté à comprendre clairement son 4e critère (avoir, au minimum dans un état dispositionnel, un état avec du I-content = ??? ) et voir quels sont les cas où il s'applique ou pas (insectes? bactéries? plantes?). En d'autres mots, je comprends (peut-être) son exemple pour les chiens, mais peut-on se demander de façon cohérente si ajouter la métacognition aux plantes (3e critère) leur permettrait d'avoir des expériences du genre 'j'ai vu cette chenille dans le passé'? Je trouve que la question est trop hypothétique et est incompréhensible, ce qui n'en fait pas un très bon critère pour délimiter une catégorie aux implications morales floues...

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    2. Lisez l'autre article, sur la manumission...

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  2. Ce qui me parait dérangeant, avec l'idée de manumission, c'est qu'avant de faire la manumission des animaux, il faudrait reconnaître d'emblée qu'ils sont des choses qui n'ont aucun droit («esclave»). Je trouve ça pénible d'insinuer qu'on a un droit de regard sur ce qu'ils ont droit. De plus, la loi québécoise, indique clairement que les animaux sont dotés de sensibilité et indique qu'on a devoir de protection et cela inclut les animaux domestiques, mais aussi tous les animaux d'élevage et les poissons. http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/ShowDoc/cs/B-3.1
    Par contre, ce qui est considéré un bien-être est assez faible. nourriture, eau, espace «convenable», pas de «maltraitance» https://www.mapaq.gouv.qc.ca/fr/Productions/santeanimale/securitebea/Pages/Securitebienetre.aspx
    Ça reste que les animaux ne peuvent être libres, juste que si on interagit avec eux, il ne faut pas les maltraiter. Mais donc, la question n'est pas de savoir s'ils ont la sensibilité, car c'est accordé. C'est plutôt d'appliquer la loi, et comment.

    Je vois mieux que le débat de sensibilité n'en est pas un. Côté science, on a une bonne idée de ce qui probablement ressent. Mais on peine à trouver une méthodologie acceptable pour démontrer le ressenti. On a d'un côté plusieurs modèles théoriques candidats, mais qui sont arbitraires, car on ne sait pas ce à quoi ça ressemble un mécanisme du ressenti. Et d'un autre côté on a pleins d'études qui démontrent les capacités cognitives plus ou moins complexes. Au moins ces dernières permettent de démystifier la complexité de la vie mentale des animaux qui n'est pas connue par la majorité des gens et poussent à changer notre point de vue. Oui par anthropomorphisme et oui, c'est bête (voyez l'ironie d'utiliser ce mot) d'avoir besoin d'enseigner cela, car à mon sens c'est une question d'éducation. Au même titre qu'on combat les autres inégalités en confrontant la peur ou la méconnaissance. Je pense que le problème vient entre autres du fait qu'on n'est juste plus en contact avec les animaux et qu'on n'a plus conscience de leur exploitation. Pour la plupart, le seul animal qu'une personne verra c'est son chat/chien. Combien de gens connaissez-vous qui savent que les poissons sont capables de «jouer» entre eux, ou que les poules peuvent rechercher des contacts affectifs, qu'un gorille peut «vivre un deuil» et qu'une vache va gémir toute la nuit après qu'on lui enlève son veau. C'est de la dissonance cognitive, car tout le monde le sait, c'est juste facile à oublier d'où vient la nourriture.

    Donc, côté science, la question est importante, mais se situe surtout au niveau des bactéries, des insectes, où il y a beaucoup plus d'incertitude alors qu'avec les animaux, il me semble donc que c’est assez accepté que les animaux ressentent.
    Mais donc ce n'est pas un débat, mais un travail d'éducation et d'application des lois. Peut-être que la loi n'est pas assez forte par contre. Après tout, ça légitimise clairement l'exploitation, en mentionnant l'élevage, en autant qu'un minimum de bien-être est assuré.
    La voie de la manumission, à mon sens, permet d'accorder le droit de s'appartenir, donc de ne plus être soumis à quelconque exploitation ou décision d'une personne. On a toujours un devoir de protection, mais pu de droit d'exploitation. Ça reste par contre très sélectif. Quelles sont les autres voies que vous avez abordées hier?

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    1. "Ce qui me parait dérangeant, avec l'idée de manumission, c'est qu'avant de faire la manumission des animaux, il faudrait reconnaître d'emblée qu'ils sont des choses qui n'ont aucun droit («esclave»)"
      - Justement je pense que c'est là le but de la manumission : le fait d'autoriser la manumission des animaux sur la base du fait qu'ils sont capables de faire leurs propres choix et qu'ils sont donc des personnes est une proposition qui me semble acceptable. Une fois qu'elle est acceptée, elle permet de se représenter les animaux "non-manumis" comme étant esclaves, ce qui était difficile à accepter à la base mais qui devient plus facile par proxy.

      Je pense comme toi que de déterminer la présence ou l'absence de ressenti chez les animaux concernés le plus directement par la question du "personhood" est inutile en soi. Cependant, je pense que le fait d'essayer de répondre quand même à la question du ressenti peut permettre de déconstruire les notions qu'on se fait de l'individu, de l'organisme, du libre-arbitre et donc du statut de personne. Le fait de baser nos lois et notre morale sur le sacro-saint statut de personne peut s'avérer contre-productif (c.f. dilemmes moraux comme le trolley problem). Le cas des animaux, et peut-être bientôt, de l'intelligence artificielle, devrait nous forcer à revoir tout ça et à développer des concepts opérationnels plus adaptés. Cela ne relève pas uniquement de la science mais bien de la philosophie, du droit et de la politique.

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  3. Je me demande si les animaux ont le droit de disposer de leur existence telle qu’ils l’entendent. Comme le dit Benjamin, il est reconnu qu’ils sont sensibles. Le problème n’est pas là. À quel point est-il légitime que l’humain impose des contraintes aux animaux? Le principe de consentement intervient. Toutefois, d’une part on ne peut pas obtenir un consentement explicite et d’autre part, il est vraiment facile de manipuler un animal et de l’amener à faire des choses qui ne sont pas dans son intérêt. Les animaux ne sont pas conscients des conséquences de leurs actes de façon aussi large que nous. Mais d’un autre côté, nous ne sommes pas vraiment en mesure de juger de leurs intérêts.

    Supprimer un plaisir est-il équivalent à «faire souffrir» ? Il me semble que non. Il y aurait donc un seuil raisonnable d’utilisation des animaux si la morale c’est «ne pas faire souffrir».

    Est-ce que cela fait souffrir les animaux de réduire leur liberté ? Si non, alors la manumission n’est peut-être pas nécessaire.

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  4. Tu apportes une bonne nuance. Ne pas faire souffrir, je pense qu'on s'entend tous sur ça. Maintenant, est-ce qu'un animal a droit de faire se qu'il veut? Dur à savoir ce qu'ils veulent effectivement, car on ne peut leur demander. Pour ce qui est des animaux domestiques, on est obligé de réduire leur liberté pour les protéger et pour vivre en société. Leur habitat naturel c'est avec les humains par définition et eux ne peuvent suivre les règles de société sans nous. Je ne peux laisser mon chien vagabonder les rues de Montréal, s'accoupler comme elle veut et manger tout ce qu'elle trouve sur la rue... Mais les animaux non domestiques, qu'on retire de l'habitat naturel sans nécessité (disons qu'on accepte l'utilité des animaux lorsque nécessaire Ex:recherche cancer), est-ce que le fait de s'assurer de ne pas faire souffrir un animal est suffisant? Comment comparer le "bonheur" d'un chimpanzé qui vit en réserve naturelle versus un chimpanzé qui vit dans un zoo. Est-ce qu'il est mieux de se faire nourrir, mais d'être pris dans une même cage? Ou d'être indépendant? Est ce que je pose des questions hyper-anthropomorphiques??! Je suis certain qu'on peut trouver des sources sur la dépression chez les animaux, est-ce que le taux est plus grand en captivité?

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    1. Selon moi, le «bonheur» est proportionnel au niveau de stimulation de l’organisme sous différentes conditions. Ces stimulations doivent se trouver dans un intervalle de tolérance, bien entendu. Il me semble que l’animal sauvage qui doit chasser pour se nourrir, développer des apprentissages, une certaine autonomie et être en mesure de découvrir de nouvelles choses sera nécessairement plus «heureux» que l’animal contraint par une vie en captivité. Est-ce que l’animal contraint en souffrira ? Peut-être pas nécessairement. Mais je trouve tout de même pénible de m’imaginer supprimer les sensations les plus agréables de l’existence à un animal sans qu’il en soit conscient. Je vis très mal avec l’idée que des animaux soient dans des cages, quand bien même on leur servirait leur nourriture préférée tous les jours.

      Et je vis mal avec l’idée de domestication aussi. Mon chien, je l’aime énormément. Mais le mode de vie qu’on leur impose va à l’encontre de leurs instincts, leurs «désirs» si l’on veut. On doit les dresser pour qu’il s’intègre dans notre société ; leur imposer une façon d’être. Je pense que la cage qu’on impose à nos chiens est juste un peu plus grosse et un peu plus animée que celle du singe dans le zoo. Le principe est le même.

      Soyons d’accord : il y a des choses qui ne se font pas. Maintenant, reste à déterminer lesquels. J’ai la forte intuition que l’utilisation des animaux c’est de l’abus. Et j’ai la forte intuition que l’abus c’est mal. Dans n’importe quel contexte, que ce soit pour la recherche ou pour la domestication.

      L’état actuel des choses nous place devant un problème que tu soulèves : ils sont domestiqués et souvent dépendants de nous. Si on en arrivait à la conclusion ferme que la domestication c’est mal, je crois qu’on n’aurait pas le choix de les laisser aller dans la nature. Et j’imagine que beaucoup de souffrance émanerait de cela, mais j’imagine aussi un monde meilleur sur le long terme. J’ai parfois l’impression que le mal est nécessaire pour obtenir le bien ? Que la désorganisation est nécessaire pour obtenir une meilleure organisation, en quelque sorte. Est-ce une intuition qui se tient ?

      Quoi qu’il en soit, il y a une part d’égoïsme plutôt forte chez la plupart des humains, et cette part n’est certainement pas à négliger dans notre façon d’appréhender le problème.

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  5. Je n'ai pas pu assister au cours passé. Il se peut que je ne saisisse pas un truc par rapport au texte traitant la manumission. Je trouve la logique du texte douteuse.

    En gros, l’auteur essaie de transférer le concept de manumission aux chimpanzés.

    1- On ne sait pas si un chimpanzé pourrait avoir un statut de personne à la base.
    2- On ne parle pas des chimpanzés qui n’ont pas de maitre ( sont-ils déjà des personnes ?)
    3- Une personne humaine qui a été ‘’manumisée’’ aurait ensuite un statut de personne.
    4- Un chimpanzé qui vivrait le même procédé de manumission qu’un humain pourrait être considéré comme une personne.
    5- Donc, à première vue, et selon ma compréhension du texte, un chimpanzé pourrait être considéré comme une personne s’il ( et seulement si) a eu un maître au préalable et qu’il a été manumisé par ce dernier, ou par la loi.

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